Michael Melnick

Vers des religions plus vertes?

mars 1, 2020

Pourquoi la défense de la planète n’est pas populaire chez les religieux?

Le rabbin Yonathan Neril fait partie de ceux qui veulent changer les mentalités des juifs pratiquants sur le thème de l’environnement et leur faire prendre conscience que ce sujet  les concerne tous et ne doit pas être uniquement laissé dans les mains du divin

Fondateur du centre multi-confessionnel  pour le développement durable basé à Jérusalem  (ICSD), le rabbin Neril avance plusieurs explications aux raisons du divorce ou, du moins au  manque d’empathie des religieux, vis-à-vis de l’écologie.

Il est désormais plus que  temps d’aborder ce sujet pour y remédier et éviter des comportements irresponsables qui dégradent la planète, souligne-t-il.

Selon lui, une des raisons du divorce entre environnement et religion provient d’un malentendu. « Les préoccupations environnementales ont commencé à s’exprimer à l’époque hippie dans les années 60 quand les jeunes prônaient la liberté des mœurs » et s’élevaient, souvent par extension, contre les valeurs religieuses. Un fossé s’est alors créé avec les religions toutes confessions confondues, explique Neril.

Des religieux ont alors dénoncé ces mouvements les qualifiant de « séculiers et anti-religieux ». Les écologistes ont été assimilés à ces groupes hippies et considérés comme anti-systèmes et contre les religions et de ce fait n’ont pas bénéficié de la sympathie, ni du soutien des communautés religieuses. La cause environnementale a donc été négligée, poursuit-il.

Il faut aussi ajouter que l’enseignement des textes anciens éloignent bien souvent les fidèles des préoccupations modernes.  

Ceux qui étudient les textes anciens sont moins sensibles à l’actualité et aux grandes questions de société ou ne s’y intéressent qu’à travers le prisme de la religion. D’où le manque d’ouverture des communautés religieuses, reconnaît aussi le rabbin.

Et il existe une autre raison évoquée par les religieux pour justifier ce divorce à savoir que la défense de l’environnement est du domaine du divin. Au bout du compte tous les problèmes seront résolus quand le Messie viendra, donc il n’est pas nécessaire d’intervenir dans la lutte contre les changements climatiques considérée comme du ressort du divin  et non de la responsabilité de l’Homme, explique le rabbin  Neril qui rapporte les arguments de certains religieux . 

 « Il faut s’élever contre ces discours et convaincre les juifs ^pratiquants de l’urgence de changer leurs habitudes pour le bien de la planète, leur expliquer que leurs actions sur Terre comptent et qu’ils sont responsables”, poursuit le rabbin.

La foi doit les aider à œuvrer dans ce sens et c’est ce que je m’efforce de leur enseigner, ajoute-t-il. Il cite ainsi l’exemple de Dieu qui dit à Adam que personne ne sera là pour réparer les dégâts faits  à la Terre  et il en va donc de sa responsabilité. 

Photo by Diana Simumpande on Unsplash

La foi doit être au service de l’environnement 

L’Eglise catholique par la voix du pape François s’est récemment convertie à l’écologie . Le Pape n’a cessé de rappeler l’urgence d’agir afin de protéger la Création. « Nous sommes gardiens de la Création(…) gardiens de l’Autre, de l’Environnement », a-t-il plaidé à maintes reprises. Témoignage de son engagement : sa première encyclique Laudato Si publiée en juin 2015 sur la sauvegarde de la maison commune et les nombreuses conférences sur l’environnement organisées au Vatican. Il n’a d’ailleurs pas hésité à qualifier de « péché environnemental  » les atteintes à l’harmonie de la nature.

 » Il faut savoir entendre le cri de désespoir de la planète et celui des pauvres gens » qui sont les premiers à souffrir des dérèglements climatiques. La foi doit nous apprendre à protéger notre planète, à prendre des mesures pour éviter la dégradation de notre environnement causée par l’Homme c’est notre devoir », a plaidé le souverain pontiffe à maintes reprises.

Katharine Hayhoe, climatologue canadienne et chrétienne évangélique fait également partie de ceux qui veulent réconcilier la religion, l’environnement et la science. Elle milite pour la protection de la planète et appelle tous les fidèles à mettre leur foi au service de l’environnement.

La foi en Dieu doit donner la force de se battre pour préserver l’environnement et aider la planète. Dans ses nombreuses interventions publiques ,  Hayhoe  reconnue internationalement pour ses études scientifiques sur le climat et classée parmi les 100 personnes les plus influentes par le magazine Time en 2014, explique comment les pauvres sont les premières victimes du  dérèglement climatique « notre devoir de chrétien est de leur venir en aide ».

Le rabbin Neril espère que le fossé sera prochainement comblé entre religieux et militants environnementaux. Il se montre plutôt optimiste citant les différentes actions menées  récemment.  “En 2014, le comité des évêques de l’Eglise suédoise a rédigé un communiqué sur le changement climatique. En 2015 le pape François a fait une encyclique Laudato Si appelant à prendre soin de la planète comme si c’était sa propre maison.  Les musulmans se sont également exprimé en faveur d’actions pour la planète tout comme la communauté bouddhiste et 100 rabbins ont signé une lettre sur le judaïsme, le végétarisme et le veganism.”

La défense de l’environnement, une valeur juive mais qui est trop négligée

Mais en Israël, le rabbin Nevil se désole du peu d’empressement de la communauté juive pratiquante à se soucier de l’environnement.

Les juifs orthodoxes continuent à utiliser de la vaisselle jetable sans scrupules car il est ainsi plus facile de respecter les règles de la cacherout et de faire des grandes tablées notamment lors des fêtes.

ICSD œuvre pour faire prendre conscience à cette communautés de la nécessité de protéger la planète et s’appuie sur les textes rabbiniques dont l’un  “Bal Tach’hit,”  enseigne à prévenir « les destructions injustifiées » même en temps de conquête. Le Talmud a étendu ce principe en dénonçant le gaspillage de nourriture. Maimonide mentionne les interdictions de « bris d’ustensiles, de déchirure de vêtements, de destruction de bâtiments l’obturation de puits et le gaspillage de nourriture ». Au 19e siècle le rabbin Hirsch souligne que rien – même ses propres biens-  ne peut être détruit sans raison.

Les textes et les commandements de la Torah ont beaucoup de choses à nous enseigner sur le thème du développement durable, souligne une organisation nommée Hazon (vision) basée aux Etats-Unis et qui s’inspire des valeurs juives pour défendre l’environnement. Hazon rappelle notamment le commandement de la “chmita” qui appelle les agriculteurs juifs à observer tous les sept ans une année de jachère pour laisser reposer la terre. La prochaine année de jachère doit commencer le premier jour de l’année 5782 soit à l’automne en 2021. Sera-t-elle respectée?

Plus proche de nous  souvenons-nous également qu’un des pères fondateurs d’Israël, David Ben Gourion, avait une sensibilité écologique et croyait déjà en 1956 à l’énergie solaire.

Cet article a été écrit par * ZAVIT – Agence de presse israélienne pour la science et l’environnement


       







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